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Alioune Diop, jeune intellectuel Sénégalais, prépare dès 1941 ce qui sera l’œuvre de sa vie : Présence Africaine. Homme de culture et homme de dialogue avant tout, il rassemble, pendant cette période de triomphe de l’hitlérisme, des amis fidèles, des compagnons de lutte.
La Deuxième Guerre mondiale s’achève, et en 1945, au moment où mûrit à Paris l’idée d’une « présence africaine » affirmée, ce sera le Congrès Panafricain de Manchester qu’Alioune Diop évoquera plus tard en ces mots : « Le Panafricanisme hérité des militants noirs américains et antillais battait son plein, à la fin de la Deuxième Guerre mondiale, et 1945 voyait se dérouler le Congrès Panafricain avec Williams Du Bois, Kwame Nkrumah, George Padmore, Jomo Kenyatta et d’autres. L’idée d’un rassemblement d’hommes noirs issus de toutes les zones du monde n’était donc pas nouvelle »
En fondant au mois de novembre 1947 la Revue Présence Africaine, Alioune Diop s’inscrivait dans cette longue chaîne « d’identités remarquables » qui marque l’histoire de l’émancipation des peuples noirs.
L’éditorial du premier numéro de la Revue donne le ton. Alioune Diop choisit pour son intitulé le proverbe toucouleur, Niam n’goura – Niam n’goura vana niam m’paya, littéralement, « Mange pour que tu vives, ce n’est pas mange pour que tu engraisses ». La Revue est à pied d’œuvre pour redonner à la culture africaine sa place dans le concert des nations.
Pour la première fois, l’Afrique Noire et le monde noir dans son entier s’expriment dans une revue de large audience. Cette période, qui produit sept numéros, entre 1947 et 1949, est la représentation du courage qu’implique tout prise de conscience et d’affirmation de soi ainsi que de la générosité qui préside à tout volonté de dialogue, de conversation entre « hommes libres ».
En 1947, dans un paris encore plein de l’excitation du grand réveil de la Libération, mais démuni au possible, prétendre fonder une revue mensuelle sans disposer de grands moyens matériels tenait quelque peu de la gageure. L’idée de Présence Africaine, le projet d’une revue ouverte à la collaboration de tous les hommes de bonne volonté, susceptibles d’aider à définir son originalité et de hâter son insertion dans le monde moderne, cette idée avait retenu l’attention des plus lucides, des plus attentifs aux mouvements de pensée issus de la grande crise de 1939-1945. Ce furent entre autres, André Gide, Jean-Paul Sartre, Albert Camus, Emmanuel Mounier, Michel Leiris ; Alioune Diop réunissait ces écrivains et penseurs auxquels s’ajoutaient des personnalités comme Richard Wright, Léopold Sédar Senghor… Il importait que la Revue ne s’enfermât pas dans une attitude sectaire, il ne fallait pas qu’une idéologie quelconque restreignît son audience.
Du 10 novembre 2009 au dimanche 31 janvier 2010, le musée du Quai Branly a organisé une exposition autour de la Revue. Cette exposition présentait de nombreux ouvrages et documents d’archives, des photographies et quelques objets. Des enregistrements sonores et audiovisuels occupaient également une place importante : documents d’époque et interviews spécialement réalisés pour cette exposition ponctuaient le parcours.
Il s’agissait de donner à voir l’émergence et l’influence d’un mouvement, d’une tribune pour la pensée et les revendications du monde noir à une époque où la majeure partie de l’occident en avait une vision déformée, voire dépréciatrice.